Diverses harpes rencontrées au hasard de mes lectures constituent les points de départ de « Harpes de toutes couleurs ». Les musiques que m’ont inspiré ces harpes venant de la nuit des temps ou imaginées par des écrivains, poètes et peintre, sont articulées en quatre tableaux sonores.

1° tableau : Babylone/Egypte 

C’est une scène de procession à Babylone (environ 600 ans avant J.C.) représentée sur un bas-relief qui fut m’a première source d’inspiration : une grande quantité de musiciens dont plusieurs harpistes jouent (que jouent-ils ?) en marchant d’un pas rythmé. Cette scène m’a inspiré une musique mélodique et rythmique où la harpe bleue joue à la fois le rôle d’une percussion et d’un instrument mélodique.

Le thème du  « harpiste » qui  fait son apparition en Egypte au Moyen Empire (environ 2000 avant J.C.) dans les décors des tombeaux des grands personnages fut ma deuxième source d’inspiration : ce musicien, généralement aveugle, compensait son handicap par une très grande habileté musicale. Il jouait et chantait en l’honneur des dieux pour assurer aux morts le bonheur dans l’au-delà. Un solo de harpe bleue simulant un chanteur s’accompagnant de sa harpe illustrera cette scène.

2° tableau : La harpe éolienne (d’après « Vendredi ou les limbes du Pacifique » de Michel Tournier)

Andoar est le nom que  donne Vendredi à «  une sorte de bouquetin gros comme un ours » et « d’une obtuse brutalité », avec lequel il s’opposera dans un violent combat mortel où Vendredi aura par miracle raison de l’animal.

« Le grand bouc est mort, mais bientôt je le ferai voler et chanter… »

Après avoir fait de sa peau un cerf-volant, Vendredi laisse au soin des fourmis le nettoyage de la tête d’Andoar et projette d’utiliser ce squelette de crâne (un « massacre ») pour s’en faire un instrument à cordes éolien. Le récit de Tournier m’a inspiré un développement musical sur un son « résonant » riche en harmoniques, joué par la harpe bleue accompagné de glissendi aux autres harpes, évoquant le vent dans les cordes de la harpe éolienne.

3° tableau : La ronde infernale (d’après le panneau droit du triptyque « Le jardin des délices » de Jérôme Bosch)

Ce tableau évoquant l’Enfer présente indéniablement un aspect sonore : outre les nombreux instruments qui y tonitruent tels les immenses cromornes, les tambours ou la vielle et la harpe géantes, il semble y régner un constant bruit infernal dans le fouillis des nombreuses scènes que Bosch y a représentées.

Ceci m’a inspiré un fouillis sonore organisé dans une structure circulaire (la ronde) où chacun des éléments musicaux de la polyphonie se déplace avec leur exécutant sur quatre harpes différentes dont la harpe bleue, qui leurs donnera une sorte d’amplification « infernale ».

4° tableau : Schubert/Goethe : le joueur de harpe (Schubert: Gesänge Des Harfners  I, D 478 d’après le Wilhem Meister de Goethe)

Ce sont certains enchaînements d’accords et des mouvements de basses extraits du Lied de Schubert qui constituent le matériau principal de ce tableau. Après quelques mesures de citation  de l’œuvre originale, la harpe bleue s’approprie les harmonies de Schubert pour les transposer, grâce à un effet sonore et une dilatation du temps, dans un style plus proche de la musique nouvelle que d’une esthétique romantique.